Comment te sens-tu?
J’entends souvent cette question. Comment tu te sens? Comment ça va? Comment tiens-tu le coup?
C’est rassurant de savoir que les gens se soucient de moi. Mais c’est aussi tellement difficile de répondre. L’éventail d’émotions en moi peut être très vaste. Parfois, je ne suis même pas sûre de savoir comment je me sens.
Je ne pense pas que je pourrai revenir à ce que je ressentais « avant ». Même quand tout va bien pour Elliot, il y a un sentiment que je n’arrive pas à récupérer: l’insouciance. Ce sentiment a quitté le bateau.
Il y a un sentiment qui est constant et je pense que de nombreux habitants de la planète cancer pourront le reconnaître. Parfois, ce n’est qu’un faible susurrement dans le fond de votre esprit, d’autres fois c’est un grognement énorme qui vous submerge. C’est difficile de lui trouver un nom, c’est un sentiment que je n’ai jamais ressenti auparavant. Mais la meilleure façon de le décrire est un croisement entre la colère et la peur. Ces deux sentiments se rallient pour donner un sentiment accablant … Nous pourrions l’appeler colpeur.
Mais ce ne sont pas seulement de la colère et de la peur ordinaires, c’est une rage absolue et une terreur écrasante tout en un. Ça, c’est la colpeur.
C’est ce que vous ressentez quand vous pensez aux Pourquoi. Et aux ‘Si’. Ça passe bien avec une portion de ‘Ce n’est pas juste.’ (Ou toute autre phrase que vous jugerez nécessaire).
Une autre émotion étrange ressentie depuis le début de cette aventure cancer s’appelle le souspoir. C’est un mélange de soucis et d’espoir. C’est comme jongler avec dix épées tranchantes, assise sur un monocycle, sur une corde raide, qui est peut-être au-dessus d’un filet … Personne ne veut vraiment partager vos moments de souspoir, il est donc préférable de le garder pour vous.
Oh, et puis il y a cette sensation merveilleuse, l’Epuixiété : une anxiété écrasante, mélangée avec un épuisement absolu, qui survient, généralement, environ trois heures avant de pouvoir vraiment aller au lit. C’est particulièrement aigü les jours avant un scan ou une IRM. Toute personne ayant à faire avec une personne ressentant de l’Epuixiété est susceptible de se faire très mal recevoir.
Oh, mais attendez ; un de mes sentiments préférés est l’impacrainticipation, pas vous? C’est un merveilleux cocktail d’impatience, de crainte et d’anticipation qui apparaît en attendant les résultats des tests, en attendant de voir l’oncologue, en attendant la chimio, en attendant un scan, attendre, attendre, attendre …
Et puis il y a une dose occasionnelle de folvosité, une fusion de nervosité et de folie qui frappe souvent tout d’un coup, par exemple juste après que votre enfant ait renversé le plateau de médicaments en essayant d’échapper à l’infirmière, et qu’il faut tout recommencer, et vous êtes submergé par un rire tout à fait inapproprié.
Sans oublier le Pardoccupes-toi-de-tes-oignons, souvent ressenti en public lorsque les gens vous regardent. Je l’ai ressenti lors d’un arrêt rapide à l’épicerie après une journée de chimio quand Elliot a fait une crise de nerfs parce qu’il voulait un jouet. C’est un mélange d’apitoiement sur soi-même et le souhait de dire aux gens exactement ce qu’ils peuvent faire de leurs conseils aux parents.
Mais le plus beau, je suppose, c’est le Soulagrin, un panachage de soulagement, quand vous obtenez finalement de bons résultats, et le chagrin de concéder que votre vie ne sera plus jamais la même.
Que c’est bien dit! Bravo… c’est exactement tout cela à la fois!!!
Bises à toi et Elliot!
Stèph, maman de Manech